Le Petit Bridge

Il existe deux sortes de jeux d’apprentissage : ceux qui brandissent leur vocation pédagogique comme un panneau d’autoroute, et ceux, plus malins, qui enseignent en douce. Le Petit Bridge appartient clairement à la seconde catégorie. Sous son nom un peu sage et son allure presque rétro, il propose en réalité une initiation remarquablement efficace non pas tant au Bridge qu’à son ancêtre : le Whist.

Le principe est limpide : pas d’atout, pas de conventions, pas de fioritures. On joue des cartes, on fait des levées, on compte, on observe. Et c’est précisément cette absence qui fait toute la richesse du jeu. En supprimant l’atout, Le Petit Bridge oblige le joueur à se concentrer sur l’essentiel : la hiérarchie des couleurs, la gestion des cartes fortes, le tempo. Bref, le cœur du jeu de la carte.

Là où le jeu se montre particulièrement malin, c’est dans sa capacité à introduire progressivement des notions typiquement bridgeuses sans jamais les nommer comme telles. L’impasse n’est pas annoncée, elle s’impose d’elle-même. L’affranchissement n’est pas expliqué, il se découvre par l’expérience. Quant à la gestion des communications, elle apparaît comme une évidence… souvent après coup, quand on a compris un peu trop tard pourquoi la donne a mal tourné. Le Petit Bridge n’est donc ni spectaculaire ni immédiatement gratifiant. Il ne flatte pas le joueur, il le forme. Il demande de la patience, de l’attention et un certain goût pour la logique. En cela, il ressemble beaucoup au bridge lui-même, ce qui est sans doute le plus beau compliment qu’on puisse lui faire.

Un excellent jeu d’apprentissage, austère en apparence, mais redoutablement efficace. Et l'espoir pour de nombreux bridgeurs senior de disposer enfin d'un outil pour intéresser leurs petits-enfants au jeu qui les passionne tant.